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Brouillons pour une constitution.
PRESSE entre LIBERTE ET PUBLICITE
Comme je préconise une constitution séparant un pouvoir médiatique des autres pouvoirs, je me dois de réfléchir sur la presse :
Un journal a deux objectifs celui d’informer et celui de survivre, dans nos principes économiques actuels un journal est d’abord une entité économique et il doit au-delà de son objectif de service d’information, assurer son équilibre commercial pour pouvoir précisément continuer ce service.
Normalement le client paye un service : satisfaire son désir d’information, mais vu l’état de la concurrence, et surtout l’impossibilité de donner une valeur commerciale à l’information un journal se retrouve a faire des choix de ligne éditoriale :
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Choisir une information d’une telle qualité que sa valeur seule suffit à la survie de son support à condition que ses coûts soient très réduits. Cette survie dépend donc surtout de la capacité à recueillir de scoops suffisants puissants pour attirer la clientèle. Ainsi on a vu Rue89 et Médiapart choisir le support internet pour limiter les coûts mais il semble évident que faute de scoop retentissants, Rue89 soit en perte de vitesse.
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Choisir une information assez nécessaire pour justifier son prix, ainsi « Que choisir » a choisi son indépendance pour lutter contre le même type de journal « 50 millions de consommateurs » produit émis par l’état donc sujet au doute issu d’un volontarisme supposé de l’état pour prôner certaines consommations ? ce journal ne survit finalement que de son indépendance ! Quelle tentation en cas de grandes difficultés de se laisser aller à satisfaire un donateur discret.
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Celui d’une information résolument militante qui peut se passer de publicité, l’argent venant du militantisme lui-même il est en quelque sorte une publicité pour un parti précis (minute, humanité) ou un journalisme militant qui survit de dons et de bénévolat plus que de ses propres ventes (Le Ravi). Pourtant l’information émise est si « colorée » qu’elle perd en crédibilité. Pour tous ces journaux, il reste toujours tentant de passer discrètement des encarts publicitaires (exemple une pub pour libération dans Charlie Hebdo, moindre des choses puisqu’ils les hébergent suite à leur incendie).
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Un quatrième choix est celui de décorer l’information avec plus ou moins d’humour, le Canard enchainé dévoile des informations pertinentes avec un ton satirique et Charly hebdo au contraire vend de la satire avec un ton d’information.
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Le cinquième choix est d’équilibrer l’information avec la publicité payante, cela marche si bien que le journal peut même aller jusqu’à la gratuité (20 minutes ou télévisions). L’information perd en liberté puisqu’elle ne pourra guère se permettre d’aller contre ses annonceurs.
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Le sixième choix est un journal ouvertement publicitaire, son seul but est de rassembler des publicités, ainsi certains grandes marques éditent leurs propres « journaux » informant sur leurs promotions, prix et articles.
Ou est la priorité du journal ?
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Rentrer des publicités : l’information n’est plus qu’un prétexte pour amener les lecteurs à choisir ce journal pour être sûr que les annonceurs continueront à le lire,
- Informer : la publicité pourra exercer une forme d’autocensure.
La liberté de la presse est finalement contraire à sa survie dans la logique économique actuelle.
Reste une question essentielle qu’est ce que la publicité ? Après tout c’est aussi de l’information, que ce soit sur des faits, des idées, des partis ou des produits. Parfois la publicité commerciale utilise cette idée pour se déguiser en articles rédactionnels, les partis savent très bien utiliser cela pour détourner les fameux temps de parole. Un reportage peut discrètement encenser un candidat sans que cela lui soit imputé sur son temps. Inversement une publicité peut utiliser une information pour passer son message, une publicité pour un produit « green washing » passe mieux si elle informe d’un fait réel de pollution même si son produit n’a quasiment aucun rapport.
Entre déontologie/éthique et comptabilité/rentabilité, le journalisme se doit d’être clair sur son objectif, travaille t-il en priorité pour gagner sa vie ou pour informer. Il ne devrait pas y avoir le même terme de « journaliste » entre le présentateur tv et le reporter de guerre, les deux ont choisi des priorités opposées !
Ce problème diminue grandement si nous appliquons une autre forme économique à la presse avec une comptabilité qui s’intéresse plus à l’utilité sociale de l’entreprise qu’à son rendement vis à vis de ses seuls propriétaires.
Page écrite le 16-05-2012