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Brouillons pour une constitution

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Réflexions à propos de la "libre disposition de son corps".


« Disposer de son corps » est une des pages les plus visités de ce site, cela doit donc correspondre à une interrogation collective importante. Que signifie cette expression, qui est propriétaire de notre propre corps ? A-t-on la liberté de faire ce que l’on veut de son corps, de quels droits la collectivité peut-elle définir des lois restrictives sur notre propre corps.

Inventaire des pratiques :

Commercialisation :

Intuitivement, chacun a le droit de faire commercialement ce qu’il veut de son corps, pourtant vendre sa force de travail, ses connaissances, son imagination, son corps ou son cul, ne sont pas des choix toujours reconnus par les sociétés. Ainsi certaines sociétés acceptent ou refusent certains de ces choix.

De même suivant l’histoire et les cultures, ont existé les droits d’acheter à autrui, des idées, du temps de travail avec plus ou moins de limites, des corps ou ses morceaux, des enfants, des vies entières même pour l’esclavage ou la guerre !

Refuser de vendre sa force de travail est aussi interdit par certaines sociétés qui font tout pour éradiquer le droit à la paresse, ou même le droit d’être asocial ou seulement nomade.

Habillage :

La façon d’habiller son corps est aussi limité par les modes et les usages, dont les seules notions de tolérances sociales définissent les limites de l’admissible. Le port du voile, de la burqa, la nudité, le port de signes d’uniformes ou de décorations, sont aussi des limitations plus ou moins codifiées de cette libre disposition de notre corps.

Déplacements :

Depuis moins de temps que vous ne le croyez vous ne pouvez même plus aller où vous le voulez sur la planète, les notions de pièces d’identités et de passeport sont historiquement très récentes. La traçabilité des individus fonctionne mieux que la traçabilité des marchandises ou des capitaux, passeports biométriques, caméras de surveillance, positionnement par téléphonie, par GPS, traces de cartes bleues, surveillance professionnelle, fiscale, médicale, surveillance internet, etc…

Sexualités :

Même les orientations sexuelles ont des limites de tolérances plus ou moins inscrites. Onanisme, homosexualité, pédophilie, zoophilie et autres pratiques sexuelles sont ou non admises suivant les cultures et les régions. Même dans l’intimité, la libre disposition de son corps s’en trouve limité. L’argument logique serait d’accepter un respect de cette libre disposition du corps pour l’autre, mais c’est loin d’être pratiqué.

Patriotisme :

En cas de guerre un état se permet même de s’approprier jusqu’à notre propre vie sans que vous ayez le moindre droit de protester ! Que dire de la vie des « ennemis » même si ces populations sont souvent non responsables des actes de leurs dirigeants ? Celui qui déclare la guerre, enverra les enfants de son propre peuple se faire tuer pour des raisons souvent économiques mais parfois pour une simple susceptibilité de l’ego de son dirigeant. Les guerres sont assimilables à des crimes en série organisés par des politiciens.

Contrôle social :

En cas de non-conformité aux usages établis, la société se donne le droit de se protéger en mettant notre corps en dehors de la société, bannissement, retour au pays d’origine, incarcération, internement en hôpital psychiatrique, mutilations chimiques ou physiques. Il n’y a plus de libre disposition de son corps pour tous ces gens là. Les valeurs sociales en cours, interdisent leur libre circulation et souvent même leur libre expression.

Contrôle sanitaire :

En cas d’épidémie, la société impose des soins, des mises en quarantaine, des vaccinations parfois imposés aux individus, pour protéger la collectivité.

Suicides :

Au-delà de ces contrôles, la société impose un devoir d’obligation à vivre, le suicide est rarement autorisé bien qu’il soit quasiment impossible d’interdire le passage à l’acte, dans certaines culture il est une humiliation que les proches font tout pour cacher dans d’autre il est accepté et parfois même est très honorable (hara-kiri). Le libre choix de mourir est juridiquement refusé même aux grands malades.

Prise de risques :

Prendre des risques est obligatoire pour certaines société (voir certains rites d’initiations) interdit pour d’autres afin de protéger la vie des autres (vitesse sur la route) de façon moins évidente pour protéger la vie des sauveteurs éventuels, (limitation règlementaires des sports extrêmes), mais également pour limiter des frais sociaux ou juridiques en cas d’accident, (Règles de sécurité de plus en plus limitatives pour toutes les activités collectives et individuelles.)

Bioéthique :

An delà de cet aspect externe, il reste la libre disposition des éléments de son corps, donner son foie ou son rein est une liberté, qui permet de sauver des vies, mais le danger vient d’une demande très forte aggravée par l’ambiance mercantile de nos sociétés. Ainsi une commercialisation se met en place autorisant les pires dérives. Le bruit court que certains pays utilisent les exécutions capitales pour alimenter ce fond de commerce, d’autres groupes mafieux s’approprient directement par la force les éléments nécessaires à ce juteux trafic. Vrai ou faux, le seul fait que cela soit vraisemblable pose le problème.

Où commence la vie ? à qui appartient le fœtus ? A ses parents, à sa mère, à la société ? Aux services sociaux qui veillent à sa bonne gestation ? A la société qui souhaite des enfants sains, mais dans quels buts réels ? Une mère aurait le droit de donner la vie mais n’aurait pas le droit de la retirer, même s’il y a eu viol ou malformation ? Là se pose déjà la question de ce qui est justifiable d’un avortement ou non, il n’existe aucune limite précise, depuis la déficience génétique grave jusqu’au choix du sexe de l’enfant tous les intermédiaires existent, qui peut donner la décision ? Il existe même des plaintes d’enfants déposés contre des parents qui se sont accordé le droit de leur imposer de vivre malgré leurs malformations.

La libre disposition du corps de l’enfant à venir dépend de qui ? Déjà le fait de procréer est limité (heureusement vu la surpopulation par certains pays) alors que d’autre au contraire utilisent la natalité comme arme politique (la démocratie donnant bêtement raison au plus grand nombre !). Quelle libre disposition du corps, et du droit d’exister ?

Si individuellement tout doit être fait pour laisser le libre choix de procréer, d’empêcher les décès à la naissance, pour limiter les maladies, pour réparer les défauts génétiques, pour prolonger la vie de tous même des plus handicapés, il reste que collectivement cela conduit à un affaiblissement génétique de l’ensemble de la population, et surtout une surpopulation qui commence à poser de graves problèmes. Cette contradiction entre l’individu et la collectivité génère deux morales totalement opposées et apparemment inconciliables.

Enfin se pose la question des cellules souches, des clones, jusqu’ou a-t-on le droit de jouer avec le corps humain ? Vos êtres malade et il existe un moyen de vous réparer à partir d’un clone ! Avoir le droit en tant que propriétaire de son corps d’en faire réaliser un clone pour pouvoir librement s’approprier les organes qui nous sont utiles, signifierait que le clone lui même n’ai pas d’existence juridique et de fait ne soit pas propriétaire lui-même de son propre corps. Seriez-vous propriétaire du corps d’un être vivant quel qu’il soit ? Le problème semble moins extrême avec les cellules souches, qui ont la même fonction, reste qu’entre les deux comme pour le choix de laisser vivre ou non un fœtus, la limite n’existe pas, tous les intermédiaires sont possibles.

Il est évident que la libre disposition de son propre corps dans sa santé, sa vie, ses actes et sa circulation est une notion fortement restreinte.

En conclusion, cette libre disposition du corps n’est plus qu’un lointain souvenir, elle existe de moins en moins par l’évolution de nos sociétés. Il en résulte un sentiment de perte de liberté de plus en plus accru. Nous avons vendu notre liberté et celle des autres contre une recherche de sécurité maximale.

Cette notion de libre disposition de son corps doit être réfléchie en tenant compte de ces constats.

Qui est propriétaire de notre corps ?

Les notions sont celles de disposition renvoyant aux questions de propriété ou de libre utilisation, mais aussi celle de la notion de corps. La question met en jeu la notion même de propriété individuelle, fondement (problématique à mon avis) de nos sociétés.

Dans une tribu primitive, il n’existe pas de notion de propriété, la nourriture est produite par tous selon ses capacités individuelles et distribuée à tous sans mesure du travail fourni. C’est un partage social car la priorité est de permettre à la tribu de vivre le mieux possible, avant même de considérer ses individualités. Le corps de chacun n’est qu’une parcelle du groupe, chacun est d’ailleurs prêt à risquer sa vie si la survie du groupe le nécessite. Le corps appartient à tous et chacun en dispose pour le bien collectif. La limite physique du corps est celle de sa tribu pas celle de l’individu.

La notion occidentale de propriété va à l’encontre de l’existence du groupe, être propriétaire de son corps comme être propriétaire d’une terre revient à nier notre dimension collective et notre environnement, qui pourtant n’existent que grâce à l’existence du groupe. Mais cette individualisation du corps se traduit aussi par une individualisation de l’esprit qui cherche à «sortir» du groupe, s’exalter lui-même au lieu de servir le groupe. Le problème d’ego est probablement lié à cette notion d’appropriation de soi. Cela conduit à une notion de liberté qui se prend sur le groupe, c’est un refus du collectif qui s’enferme lui-même dans une marginalité déviante ou une spécificité dominante, qui se veut «différent» de la masse, qui s’affirme dans la possession de richesses, de connaissances ou de pouvoir pris sur les autres. Cet aspect serait ce qui nous pousse à substituer à la coopération les principes de compétition.

Vouloir être propriétaire de son corps serait à contrario tenter d’en réduire l’utilité qu’il pourrait apporter au groupe, alors que la longue liste ci-dessus exprime les nombreuses limites apportées à cette liberté. Le groupe astreint l’individu à ses règles, aujourd’hui cette astreinte peut aller jusqu’à l’intégrité du corps lui-même ! Vous avez deux reins en bon état, celui-ci n’en a aucun vous devriez en donner un ! Entre le don spontané et généreux et l’obligation sociale coercitive, le groupe semble de plus en plus envisager le second choix. Ou reste la liberté de son corps si l’obligation trace des rails obligatoires à cette liberté.

Vous voulez de l’adrénaline, sautez en élastique d’un pont ! Mais assuré et contrôlé par des professionnels, il n’existe aucun risque, sauf celui de n’avoir pas confiance en ces sécurités. On vous donne l’illusion d’être maitre de vous, mais toute l’infrastructure sociale vous ôte tout risque réel.

Vous aves le droit d’avoir des enfants, tous les moyens sont bons ! Fécondation in-vitro, mère porteuse, et autres ovules implantés artificiellement, mais n’est-ce pas une appropriation du bébé à naître ? La collectivité pourra-t-elle survivre à de telles dérives ? Votre envie est vraie, je n’en doute pas, elle en devient un droit, la loi le permet, mais l’enfant une fois conscient risque de poser la question pourquoi m’avoir forcé à exister de cette façon dans votre monde surpeuplé et dégénéré ?

Nous n’avons pas de libre disposition de notre corps ni vraiment le droit à donner la vie, ce sont nos descendant qui disposent de notre corps, comme ils ne sont pas là, nous devons faire en sorte qu’ils en soient bénéficiaires, et non handicapés. Mais est-on assez sage pour refuser nos propres désirs quand ceux-ci vont à l’encontre de l’avenir de nos sociétés ? Nous ne savons même pas si nos décisions amélioreront ou non cet avenir ?

L’industrialisation s’est approprié la vie sous toutes ses formes, végétaux transgénique, élevages intensifs, elle a même crée des enfers où tout est calculé pour faire du poids de viande sans la moindre pensée pour la qualité de vie des animaux de boucherie. Ayant élevé et tué mes animaux de ferme, je me permets d’affirmer qu’un animal qui a été choyé et heureux de vivre donne une meilleur viande qu’un animal stressé et drogué toute sa vie. Sans compter qu’il est tué et dégusté avec un respect qui donne une toute autre dimension à la nourriture, qu’aucun citadin ne peut imaginer, sans compter qu’il devient difficile d’en gaspiller le moindre morceau.

Alors non, pour moi il n’y a pas de propriété possible de ce qui vit, mon corps vit, mais je n’en suis pas propriétaire, c’est vous tous qui m’avez permis de vivre avec la qualité de vie actuelle, mon corps appartient donc au groupe.

Par contre suis-je libre d’en disposer ? Toute l’évolution sociale actuelle conduit à limiter cet usage. Le droit au suicide à l’euthanasie, à la prise de risques, le droit de voyager de vivre sa propre vie du moment qu’elle ne nuit pas au groupe doit être reconnu. Mais qu’est ce qui nuit au groupe ? Tout ce qui déstabilise ses habitudes, tout ce qui lui fait se poser des questions nouvelles, le suicide choque, l’euthanasie aussi, la burqa choque, l’alpiniste qui meure dans une face nord choque, réaliser un clone choque aussi; comment être libre sans choquer ?

Au fait pourquoi un groupe redoute tant d’être choqué par un évènement quelconque alors que souvent ses premières curiosités vont précisément vers ces évènements ? L’accident choque mais tous ralentissent pour regarder. Je suppose que ces évènements hors des habitudes sont vécus collectivement comme un échec du fonctionnement collectif, mais ils suggèrent aux individualités des émotions leur permettant de mieux appréhender leur propre vie.

Vers une proposition ?

La liberté est-elle un acquis individuel ou une règle collective ? N’est ce pas la collectivité qui doit permettre les libertés au lieu de les restreindre et l’individu qui doit restreindre sa liberté u lieu de les revendiquer ? Ainsi chacun doit être assez sage pour se fixer ses propres règles en fonction de ce qu’il peut apporter aux autres et s’y tenir, c’est aux autres à lui permettre d’enfreindre ses règles ! La musulmane a le droit de se fixer une règle de porter le voile, mais le groupe doit lui montrer qu’elle serait libre de ne pas le faire ! (Or il semble que c’est le groupe qui impose un voile et la musulmane choisi ou non de se soumettre). L’individu se donne une règle de vivre autant que possible et se suicider si tout va mal, mais le groupe doit lui permettre de vivre en lui offrant un rôle et une qualité de vie le plus longtemps possible.

Le suicide est un choix de la liberté individuelle, c’est au groupe d’offrir une qualité de vie telle que l’individu ne soit plus tenté par ce choix.

Je constate que la plupart de suicides sont pratiqué par des gens qui se sont exclus du groupe, renfermés sur eux-mêmes, d’une certaine manière, ils se punissent de ne plus trouver leur place. Logiquement si le suicide était vécu comme une faute du groupe, le suicidé se vengerait du groupe par son suicide en essayant de faire autant de dégâts que possible. C’est le cas des intégristes qui sont très intégrés dans un groupe particulier, au point de privilégier la survie de leur groupe à leur propre survie. La seule vengeance des autres suicidés est de d’imposer aux autres leur absence. Ainsi les tentatives de suicides sont même très fréquemment des appels au groupe. L’homme utilise sa liberté individuelle de disposer de son corps pour « parler » désespérément au groupe qui n’a pas su disposer de cette individualité en lui donnant une place reconnue.

Il y a besoin d’une remise en forme du désir collectif, une acceptation des risques, une recherche collective du maximum de sécurité mais une liberté de prendre un maximum de risques individuellement. Avoir le droit de mourir en faisant des trucs invraisemblables mais ne pas risquer de mourir du fait d’un disfonctionnement du groupe.

La vie n’est pas une marchandise, d’ailleurs rien ne devrait être réduit à l’idée de marchandise, la valeur des êtres de leurs actes, de leurs outils et possessions, est une valeur collective que personne ne doit s’approprier. Le corps lui-même est le résultat du groupe, il revient à l’individu de le reconnaitre et d’en apporter au groupe le plus qu’il le peut, il revient au groupe de le faire grandir et libérer son esprit afin de lui permettre de s’exprimer avec le plus de choix possibles. L’individu ne dispose pas de son corps, il en est seulement le détenteur et doit en assumer tous les devoirs sans égoïsme ni égocentrisme, Le groupe doit permettre à chacun d’étendre son champ d’action, de libérer son imagination, de lui offrir une qualité de vie maximale.

Mais comment traduire ces réflexions en propositions concrètes ?

Rédiger des lois qui assurent une promotion des libertés individuelles tout en règlementant les comportements collectifs reste un sacré défi. Ceci est très délicat, Voici ci-dessous certaines propositions très imparfaites soumises à vos critiques (certaines peuvent même être hors sujet !):

Page écrite le 05/09/2009

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